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Témoignage de Delphine, patiente atteinte d’un Cancer du Sein

Delphine, atteinte d'un cancer du sein, nous raconte comment elle a vécu sa maladie.

Mis à jour le : 11/07/2022
20 mins
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Quand j’écris un témoignage, mes propos peuvent prendre une tournure diamétralement opposée d’un jour à l’autre. De joyeuse, positive et optimiste dans un premier temps, je peux virer le lendemain ou l’heure d’après vers une humeur plus négative, sombre et plombante.  

C’est cela un cancer.

Une suite infinie de joies, de peines, de paysages désertiques, de zones d’accalmie, de rencontres inoubliables, magiques parfois, mais aussi de pertes, de deuils à faire et de réalités difficiles à accueillir. Mais n’est-ce pas cela la vie finalement ? Une suite de hauts et de bas qui sont, pour beaucoup, particulièrement exacerbés pendant et après la maladie.

Qui suis-je ?

Je m’appelle Delphine Remy. J’habite en Belgique après avoir vécu un paquet d’années au Texas. Le cancer est venu s’inviter dans ma vie, sans aucun signe précurseur, en juin 2019. Il était petit mais très agressif et j’ai donc eu la « totale ». Tumorectomie, mastectomie, chimiothérapie, radiothérapie, mastectomie prophylactique et hormonothérapie pendant 10 ans. Je suis encore dans le long processus de reconstruction mammaire en « 6 stops ». Un vrai parcours du combattant… C’est d’ailleurs la première fois que j’utilise le mot “combat”, je n’avais pas l’impression d’être sur un ring de boxe pendant ma maladie. J’y reviendrai dans ce chapitre.

Aujourd’hui, je suis totalement investie dans la lutte contre le cancer. Mon combat pour les personnes touchées de près ou de loin par la maladie se fait via ces canaux :

Cancer ? Je gère ! Je suis loin d'avoir tout géré... Gérer pour moi signifie s'écrouler, puis se relever. S'écrouler encore et puis se relever encore, et tenter de transformer l’obstacle en tremplin.

Chacun réagira différemment à toutes les étapes du parcours de soins.

L’annonce, la mutilation, les yeux posés pour la première fois sur sa petite « zone de guerre », la perte des cheveux, le rasage de la tête, les traitements lourds, les effets secondaires, l’impression parfois d’être en décalage total par rapport aux bien-portants, les difficultés administratives, il y en a des étapes à accueillir, à franchir et à accepter ! Personnellement, ce qui m’a le plus aidé, c’est l’écriture.

Dans un premier temps, l’écriture pour dépasser le chaos de l’annonce. Il n’y a pas de meilleure image que le ring d’auto-tamponneuses pour décrire cette annonce par téléphone. Les émotions sont contradictoires. Ça cogne, ça coince, ça s’entrechoque, ça part dans tous les sens. Déni, incompréhension, agitation, culpabilité et confiance cohabitent au même instant avant de laisser place dans les jours et les mois qui suivent à des sentiments de colère, de tristesse, de solitude, de désespoir même, mais aussi de joies et de découvertes étonnantes. L’écriture me permettait de dépasser tout cela mais pour vous, ce sera peut-être une autre forme d’art, une discipline particulière, la musique, se balader avec des amies proches, le repos, peu importe. On finit tous par trouver des moyens pour gérer toutes ces étapes le mieux possible. Qu’est-ce qui vous fait du bien ? Qu’est-ce qui vous nourrit en dehors de cette réalité qui rappelle sans cesse à l’ordre ? Qu’est-ce qui vous permet de nous évader ?

La « reconstruction mammaire »

Reconstruction mammaire, reconstruction du féminin, reconstruction de SOI finalement.

Je ne peux pas ne pas vous parler de la « reconstruction mammaire », association de mots que je n’aime pas beaucoup pour être tout à fait honnête. C’est comme une promesse de récupérer un sein, de récupérer son sein d’avant, mais il n’en est rien.

Je pense qu’il est important de lever les tabous par rapport à ce processus de reconstruction qui est long, lourd et compliqué physiquement et psychologiquement. On est sensée être heureuse car on arrive en fin de parcours et de l’extérieur, la reconstruction peut paraître si simple. « Elle a perdu un sein (ou deux) et elle le(s) reconstruit (= on lui glisse une prothèse) et basta. » La réalité est loin d’être aussi simple et l’entourage ne fait pas la distinction entre la chirurgie reconstructrice et une chirurgie esthétique des seins. Ça n’a rien à voir !

J’aimerais mentionner les quelques éléments qui provoquent parfois un certain chaos psychologique…  

  • L’indécision par rapport à la reconstruction ou non ;
  • L’indécision par rapport au type de reconstruction. Toutes les informations (parfois contradictoires) récoltées chez divers plasticiens viennent se mêler aux questions personnelles par rapport à la féminité, tout cela dans un état de fatigue après les longs traitements ;
  • La fatigue des reconstructions vient se rajouter à cette fatigue préexistante ;
  • On veut croire que c’est un processus linéaire, mais la réalité nous montre que c’est un processus qui est constitué d’allers et de retours incessants entre contentements et mécontentements, entre joies et peines, entre attentes et déceptions, sans oublier de mentionner l’insensibilité des zones à reconstruire et reconstruites, et les cicatrices supplémentaires quand il s’agit d’une reconstruction autologue.

J’ai voulu très vite rencontrer des plasticiens, certains avant même de perdre mon sein. A tort ou à raison ? Peu importe, c’est ce dont j’avais besoin. Je ne peux pas vous cacher que quand je visualisais leurs slides sur les types de reconstruction possibles, la seule chose que je voyais était la souffrance, les balafres, des seins qui ne ressemblaient pas toujours à des seins, des tétons en 2D, des boules, des plis, des vagues. Je voyais l’empreinte de la maladie et je trouvais finalement que ma belle cicatrice d’amazone était plus belle. J’ai mis un an à tergiverser et à me sentir perdue dans mon identité.

Étonnant non de parler d’identité, comme si l’identité dépendait d’un sein ou de deux seins ? J’ai finalement décidé de reconstruire pour arrêter ces questionnements, obsédants par moments, et parce qu’au fond de moi, je sentais que c’était juste. C’est étonnant comme une zone qui n’était pas si investie avant le cancer devient tout à coup une zone surinvestie. Beaucoup de femmes rapportent ce phénomène.

Je pense qu’il est intéressant aussi de mentionner la différence entre le « corps organique » et le « corps symbolique ». Quand on est malade, les médecins s’adressent à notre corps organique. La priorité est de nous sauver la vie et d’éradiquer la maladie. Quand on sort de la phase « corps organique » reviennent alors la place de la féminité, tous les questionnements liés à celle-ci, et bien souvent la violence de la mutilation.

Loin de moi l’intention d’être négative, c’est absolument formidable ce qu’on fait de nos jours, mais il est important de mentionner que la reconstruction mammaire et la reconstruction du féminin n’ont pas toujours le même timing.

Il y a tout un travail personnel pour se réapproprier ce « volume mammaire » et que celui-ci devienne à nouveau un organe intime, et rares sont les plasticiens qui intègrent le regard du féminin.

Pour moi, la phase du deuil du sein est indispensable avant de pouvoir se réapproprier cette partie intime. Il faut pouvoir nommer cette blessure, « panser et repenser » sa féminité. Le toucher a été pour moi une thérapie extraordinaire. J’ai mis un an pour aller voir une kiné. Il n’y a pas beaucoup de choses que je referais différemment dans mon parcours de soins, en revanche, je ne commettrais pas l’erreur d’attendre un an pour rencontrer cette kiné qui m’a accompagnée sur le chemin de la reconstruction.

Chacune doit faire son chemin. Il n’y a pas de règle mais il est évident qu’il y a un deuil à faire pour avancer sereinement et se réapproprier son ou ses nouveau(x) sein(s).

L’après-cancer  

64% des personnes atteintes du cancer rapportent que l’après-cancer est plus difficile que la période des traitements.

Le post, c’est le vide, c’est le creux, c’est le cul entre deux chaises, le no man’s land. On a été secoué, ballotté, maintenu par quelque chose qui nous a fait avancer, quelque chose qui nous a fait vibrer, quelque chose qui nous a fait découvrir une part de nous-même tout à fait surprenante et que nous ignorions. On était en mode survie parfois, maintenu par une force de vie, un élan vital qu’on n’avait jamais expérimenté auparavant et puis… Paf. Paf. Le vide.

Des effets secondaires et des difficultés à long terme peuvent survenir. A ces difficultés se rajoute souvent l’incompréhension de l’entourage. Les cheveux repoussent, il est attendu que nous soyons aussi performants qu’avant, que la vie reprenne son cours, qu’on tourne la page mais la réalité est bien différente. C’est bien souvent l’entourage qui veut tourner la page… Ce décalage est source de souffrance. On a encore envie et besoin de beaucoup parler de ce qui nous est arrivé et on a tendance à s’autocensurer en présence de personnes qui n’ont jamais été malades pour ne pas les ennuyer avec notre maladie « soi-disant finie ».

Il n’est pas simple de rapidement tourner la page d’un événement aussi énorme qui est venu chambouler nos vies et celle de notre famille. Personnellement ça m’a énormément aidée de me rapprocher de femmes qui vivaient également ce post-cancer et qui avaient, elles aussi, lancé des projets suite à leur maladie.

Les effets et les troubles à long terme sont bien souvent invisibles. Ils peuvent être divers et variés et ne concernent pas tout le monde. J’ai envie de mentionner l’empreinte de la fatigue, les troubles sexuels et cognitifs, le retour au travail difficile, l’atteinte à l’image corporelle, les troubles émotionnels et psychiatriques, la peur de la rechute, l’infertilité, la gestion de la douleur…  Il faut trouver ses repères dans une nouvelle vie et un nouveau corps. Ça prend du temps et ça demande souvent un accompagnement.

Il y a énormément de professionnels qui sont là pour aider et j’aimerais insister sur le fait que c’est crucial d’en parler afin de ne pas laisser les troubles s’installer. Au même titre qu’il est important d’être acteur de sa maladie, il est primordial d’être acteur de son après-cancer.

Happy ending

Life sucks sometimes, je pense qu’on est tous d’accord là-dessus. Un proche me disait que la Vie, le Réel sont rugueux, on s’y écorche la peau parfois mais il y a toujours la possibilité de faire un choix, celui de transformer l’obstacle en tremplin, et c’est cela la définition de la résilience et de l’optimisme. Et puis, j’aime parler de la joie, c’est important la joie, ça permet de continuer. Il y a le choix d’accueillir la joie MALGRE TOUT, malgré tous les « life sucks ». C’est une démarche active et volontaire de tous les jours, cancer ou pas. Ça nous concerne tous, cancer ou pas.

J’ai pu constater tout au long de ma vie, dans toutes les épreuves rencontrées, certaines bien plus dures que le cancer, que c’est dans les moments les plus durs qu’on se découvre des ressources extraordinaires. Et c’est important de se le dire et redire. C’est important de faire des petites évaluations avec soi-même et se dire « Bein merde, c’était l’horreur mais je me suis encore relevée » et de célébrer toutes ces petites victoires parce que des combats à gérer, il y aura encore un paquet.

Je terminerais par mon expression préférée : Every cloud has a silver lining. Tentons d’envisager la possibilité que l’épreuve puisse faire découvrir une part étonnante de nous-mêmes, et je dirais même des ressources insoupçonnables et insoupçonnées. Ça vaut vraiment la peine d’aller creuser !

Accueillons le réel tel qu’il est, parfois atroce, dur, tragique, ne le nions pas, surtout ne le nions jamais, ne mettons pas une couche dessus pour ne pas le sentir, mais ne nous y perdons pas. Ouvrons-nous à la possibilité d’un changement. Un changement possible, une amélioration possible, une attitude différente qui changera notre regard sur la situation. Tentons de ressentir au plus profond de nous-même la fierté et le courage dont nous avons fait preuve quand nous nous sommes relevés après certains traitements, après certaines nouvelles difficiles. Je parle ici de la maladie, mais je pourrais étendre ces propos à tous les obstacles que nous rencontrons tous, et que nous allons rencontrer, parce que tant que nous sommes vivants, il y aura encore à gérer.

J’entends si souvent « On ne sera plus jamais comme avant. » A cela, je réponds « Non, on ne sera plus jamais comme avant mais si on se focalisait sur comment construire quelque chose de beau après ? »

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